Le pouvoir destructeur des plans keynésiens.

Un tel plan revient à un détournement de richesse des générateurs de richesse vers les activités étatiques.

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Figuration du New Deal américain.
Figuration du New Deal américain.

Selon John Maynard Keynes,

Les idées des économistes et des philosophes politiques, à la fois quand ils ont raison et quand ils ont tort, sont plus puissants qu’il est communément compris. Certes, le monde n’est guère régi par rien d’autre. Les hommes au sens pratiques, qui se croient bien à l’abri de toute influence intellectuelle, sont d’ordinaire les esclaves de quelque économiste désuet. Les fous de l’autorité, qui entendent des voix, distillent leur hystérie inspirée d’un gribouilleur universitaire d’il y a quelques années. Je suis sûr que le pouvoir des intérêts propres est fort exagéré par rapport à l’avancée progressive des idées. Pas, en effet, immédiatement, mais après un certain temps ; car, dans le domaine de la philosophie économique et politique, il n’y en a guère qui sont influencés par de nouvelles théories après atteindre l’âge de vingt-cinq ou trente ans, faisant que les idées que les fonctionnaires et les politiciens et même les agitateurs appliquent aux événements actuels ont peu de chances d’être les plus récentes. Mais, tôt ou tard, ce sont les idées, et non les intérêts particuliers, qui sont dangereuses pour le bien ou le mal.

John Maynard Keynes, La théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie (Londres : Macmillan, 1964), pp. 383–84.

Le pouvoir des idées keynésiennes s’affiche dans le monde actuel. Chaque fois qu’il y a des signes que l’économie pourrait bien tomber dans un marasme économique, la plupart des experts recommandent que la banque centrale et le gouvernement se lancent dans des politiques monétaires et fiscales assouplies pour contrer la possible récession économique. En ce sens, la plupart des experts suivent les idées de John Maynard Keynes.

Rapidement, John Maynard Keynes soutenait qu’on ne pouvait pas avoir une totale confiance en une économie de marché, qui est [dit-il] intrinsèquement instable. Si laissée libre, l’économie de marché peut être auto-destructrice. Dès lors, il y a un besoin des gouvernements et banques centrales pour gérer l’économie.

La bonne gestion au sein du cadre keynésien se fait en influençant pour la dépense globale dans une économie. C’est la dépense qui génère les revenus. La dépense d’un individu devient le revenu pour un autre individu, selon Keynes. Dès lors, plus il est dépensé, meilleures les choses seront. Ainsi, ce qui dirige l’économie, c’est la dépense.

Consommation et production

Au sein du cadre keynésien, la plus grande part des dépenses sont les débours de consommateurs. Par suite, les dépenses de consommation sont vues comme le moteur de l’économie : la consommation met en mouvement la croissance économique réelle.

Mais il faut faire une distinction entre consommation productive et non productive. Alors que la consommation productive est un agent de la croissance économique, la consommation non productive mène à l’appauvrissement économique.

Par exemple, un boulanger échange 10 miches de pain épargnées contre dix pommes de terre. Les pommes de terre nourrissent désormais le boulanger alors qu’il est à cuire le pain. De même, le pain nourrit le fermier aux pommes de terre pendant qu’il est à leur production. Ce qu’on a ici, c’est que les productions respectives du boulanger et du fermier leur rend possible de se procurer des biens de consommation.

Ce qui rend la consommation productive ici est le fait que tant le boulanger que le fermier aux pommes de terre consomme afin d’être capable de produire d’autres biens de consommation. La consommation tant du boulanger que du fermier nourrit leur vie et leur bien-être, ce qui est la seule raison de la production.

L’introduction de la monnaie ne change pas ce qui a été dit jusqu’ici. Ainsi, le boulanger peut échanger ses dix miches de pain contre dix euros ; il utilise alors la monnaie pour se procurer dix pommes de terre. De même, le fermier aux pommes de terre peut maintenant échanger ses dix euros contre dix miches de pain. Bien qu’elle remplisse le rôle de moyen d’échange, la monnaie n’a contribué absolument en rien ni à la production de pain, ni de pommes de terre.

Consommation non productive

Voilà que pour se procurer des pommes de terre, le boulanger a dû échanger du pain contre de la monnaie et utiliser alors sa monnaie pour se procurer des pommes de terre. Quelque chose a été échangé contre de la monnaie, qui à son tour a été échangée contre quelque chose d’autre, c.-à-d. quelque chose est échangé contre autre chose avec l’aide de la monnaie.

Les problèmes surgissent quand la monnaie est créée à partir de rien. Une telle monnaie provoque une hausse de la consommation qui n’est soutenue par aucune production. Elle conduit à un échange de « rien » contre « quelque chose ».1

Par exemple, un faux-monnayeur a imprimé vingt euros. Puisqu’il ne s’est pas procuré cette monnaie par la production de quelque bien utile, le faux-monnayeur a obtenu vingt euros en n’échangeant rien pour cela.

Le faux-monnayeur utilise la monnaie nouvellement générée pour acheter dix miches de pain. Ce que l’on a ici est le détournement de la richesse réelle – dix miches de pain – d’un boulanger vers le faux-monnayeur. Notons que le détournement prend place quand le faux-monnayeur n’hésite pas à payer un prix plus élevé pour le pain – il paie deux euros par miche. (Auparavant, le prix s’élevait à un euro par miche.) Également, notons que le faux-monnayeur n’a rien produit d’utile, il s’est lancé dans une consommation non productive.

Le fermier producteur de pomme de terre est ainsi privé du pain qu’il lui faut pour se nourrir tandis qu’il produit des pommes de terre. Evidemment, cela diminuera la production de pommes de terre. Avec comme résultat que moins de pommes de terre seront disponibles, ce qui à son tour sapera la consommation du boulanger qui à son tour diminuera sa propre capacité à produire.

On peut ainsi voir qu’alors que la consommation productive nourrit les générateurs de richesse et favorise l’expansion de la richesse réelle, la consommation non productive ne conduit que vers l’appauvrissement économique.

La monnaie imprimée par la banque centrale et créée à partir du système bancaire de réserves fractionnelles produit exactement le même effet dommageable que le faux-monnayeur. L’expansion de la monnaie pose les bases de la consommation non productive – un agent de destruction économique.

Dans le cadre keynésien, durant une récession, quand les consommateurs ont tendance à réduire leurs dépenses, il est du devoir de l’État d’intervenir et d’augmenter ses dépenses.
En l’espèce, l’État peut employer divers individus au chômage pour creuser des trous dans le sol. Le cadre keynésien soutient que la monnaie que l’État payera à ces ouvriers est susceptible d’augmenter leur consommation, et par suite il compte que cela augmente le revenu global dans l’économie.

Selon ce schéma keynésien, il importe peu si les trous dans le sol contribuent au bien-être individuel. Ce qui compte, c’est que les gens soient payés et qu’alors ils utilisent la monnaie pour pousser leur consommation.

Cependant, l’État ne gagne vraiment pas de monnaie : ce n’est pas une génération de richesse. Comment, alors, paie-t-il tant d’individus employés dans ses divers projets non générateurs de richesse ?

Il se procure la monnaie par la fiscalité, ou en demandant à la banque centrale d’imprimer de la monnaie, ou en empruntant. Cela revient à un détournement de richesse des générateurs de richesse vers les activités étatiques. Notons que cela génère le même résultat que l’impression de monnaie : cela met en mouvement la consommation non productive.

Selon Mises,

Il est nécessaire de souligner comme truisme que l’État ne peut dépenser ou investir que ce qu’il prend à ses citoyens et que sa dépense et son investissement additionnels limitent la dépense et l’investissement des citoyens à pleine hauteur de son propre montant.

Ludwig von Mises, L’Action Humaine, Institut Coppet.

De cela on peut conclure que puisque l’État n’est pas un générateur de richesse, il ne peut pas faire croître l’économie.

Contrairement à la croyance populaire, plus l’État dépense, pire c’est pour la santé de l’économie et par suite pour la croissance économique. Les experts qui prônent de très fortes mesures de stimulation par l’État durant une crise économique ne prennent jamais la peine de demander comment ces mesures seront financées.

Par ailleurs, c’est la mise en œuvre continue de politiques fiscales et monétaires laxistes sur les dernières décennies qui a provoqué la hausse de la consommation non productive. La conséquence de tout cela est le grand nombre de « bulles ».

Ce qu’il faut, ce n’est pas plus de politiques keynésiennes, mais plutôt de permettre aux producteurs de richesse de générer de la richesse réelle. Cela bien sûr signifie que ce qu’il faut, c’est beaucoup de consommation productive. Plus de dépense étatique et l’introduction massive de monnaie par les banques centrales ne fera que renforcer la consommation non productive.

Frank Shostak

  1. NdT : Comme par magie. C’est là la marque de la monnaie factice, dite « fiduciaire ».

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